À Angers, le docteur Mukwege témoigne sur les violences sexuelles

Les quatre cents personnes réunies à Angers le 14 octobre dernier pour écouter le docteur Mukwege ne se doutaient pas que, quelques jours plus tard, il allait recevoir le prix Sakharov, après avoir déjà reçus de nombreux autres prix internationaux. Ce soir là, nous avons rencontré un médecin qui, formé en gynécologie à Angers dans les années 1980, avait fait le choix de retourner dans son pays, la République démocratique du Congo (RDC), pour exercer son métier.

Il y dirige depuis 1999 l’hôpital de Panzi où il opère, écoute et aide à donner la vie ou à retrouver l’envie de vivre. Cet hôpital a accueilli plus de 42 000 femmes, survivantes de violences sexuelles (actuellement, une dizaine chaque jour).

Nous avons rencontré aussi un « combattant » qui veut que le viol cesse, qui parcourt le monde pour plaider la cause des femmes, qui n’admet pas que l’argent et les minerais aient plus d’importance que les femmes et les hommes. Les participants à cette soirée ont découvert, interloqués, les caractéristiques de ces viols en période de conflit : méthodiques (collectifs et publics, avec tortures), massifs (villages entiers), systématiques (sans considération d’âge ou de sexe).

Les principaux impacts de ces exactions sont le déplacement massif de la population, la réduction démographique, la destruction de l’économie et celle du tissu social et de la vie familiale. C’est-à-dire les mêmes impacts qu’une guerre classique mais à moindre coût…

Face à ces horreurs, le Dr Mukwege et son équipe s’emploient à une prise en charge holistique des victimes en assurant des soins médicaux, une assistance psychologique, une médiation familiale, une réinsertion socio­-économique et une assistance judiciaire et juridique. Toutes ces mises en oeuvre sont autant de défis car il y a pénurie de médecins, de psychologues et de travailleurs sociaux ; les capitaux pour la réinsertion socio­-économique sont évidemment très insuffisants ; les zones de retour post­-conflits sont très insécurisées, et les lois sont fort peu ou mal appliquées.

Ayant déjà échappé de justesse à des attentats (où son chauffeur y a laissé sa vie), ce lauréat du Prix Nobel alternatif et du Prix des droits de l’Homme de l’ONU, entre autres, compte bien poursuivre avec le même dynamisme et des convictions intactes son combat pour restaurer la dignité des femmes survivantes, réhabiliter les communautés détruites par le viol comme arme de guerre, et dénoncer l’impunité du terrorisme sexuel comme stratégie de conquête…

Jacques Bourgeois, correspondant des Amis dans le Maine-et-Loire.

Pour aller plus loin

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