Florence Bénichou est médecin, spécialisée sur les questions de santé au travail. Dans son atelier donné à l’université d’été des lecteurs du magazine La Vie, elle dresse un portrait son concession du mal-être au travail et, après avoir identifié les causes, propose des pistes nouvelles pour créer un nouveau paradigme professionnel.
« Savez-vous que 25% des salariés mettent leur santé en danger à cause de leur travail ? Savez-vous aussi que près de 26% des salariés choisissent à l’inverse de se désengager de leur travail, en s’y investissant le moins possible » ? D’emblée, le ton est lancé. Le constat de Florence Bénichou est implacable : la souffrance au travail est en augmentation constante, et les suicides au travail connus de tous ne sont que la partie émergée de l’iceberg.
Les causes sont, selon elle, bien identifiées. D’abord, les logiques trop prégnantes de compétition et de rentabilité minent le moral des salariés. Ensuite, la non-reconnaissance du travail accompli est dévalorisante. Enfin, beaucoup de salariés ne trouvent pas de sens dans leur activité.
“Les logiques trop prégnantes de compétition et de rentabilité minent le moral des salariés”
Pourtant, Florence Bénichou l’affirme : le travail devrait avant tout être source d’enrichissement et d’épanouissement, plutôt qu’une aliénation ! Selon elle, il s’agit donc de révolutionner le modèle d’organisation du travail, d’inventer de nouvelles formes de gouvernance et de revoir complètement les conditions de travail. D’innover en somme.
Des « labels » de bien-être au travail
Pour cela, elle et son équipe proposent de nouveaux outils d’évaluation des entreprises autres que les traditionnels indicateurs économiques. Par exemple le haute qualité humaine (HQH), indicateur mesurant la qualité du lien social en entreprise. Ces nouveaux « labels » de bien-être au travail ont peu d’années derrière eux, mais l’écho positif qu’ils ont rencontré auprès des salariés prouve que ces derniers réclament de profonds changements.
Enfin, au-delà des expérimentations institutionnelles, Florence Bénichou recommande de retrouver un équilibre entre vie privée et vie professionnelle, à ne pas mélanger les genres. Vaste programme…
“Certains entrepreneurs, soucieux de ces problématiques, commencent à réinventer le rapport au travail.”
Si les chantiers sont énormes, certains entrepreneurs, soucieux de ces problématiques, commencent à réinventer le rapport au travail. Des entreprises se créent dont les statuts définissent de nouvelles valeurs : démocratie dans l’entreprise, non lucrativité ou encore implication réelle des salariés. Parmi ces sociétés, les Société Collective d’Intérêt Collectif (SCIC), dans lesquelles les salariés sont aussi associés et dont l’activité doit présenter un caractère d’utilité sociale.
«Un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse», dit le proverbe. Le monde du travail fait face à de profondes mutations dont les conséquences sont à certains égards préoccupantes. Dans le même temps, de belles initiatives voient le jour qui ne demandent qu’à se multiplier.
Aubin des Mazery