Chantal Vinson, amie de La Vie à Saint-Pair-sur-Mer dans la Manche, a assisté à l’université d’été des Amis de La Vie à Sète. Elle partage avec nous ce qu’elle appelle son « fil personnel ».
« La santé, un enjeu existentiel, politique, spirituel ». Comment ne pas se sentir concerné par ce thème de la santé ? Oui, médecins, soignants, chercheurs, psys, malades et leurs proches, bien-portants, tous nous sommes avant tout des « personnes » avant d’être un organe malade, des spécialistes, ou des contribuables… Chacun a une place à tenir dans la « relation » essentielle à mettre en œuvre !
L’annonce de l’inacceptable
« Dire la vérité, toute la vérité ? J’allais trop vite dans ce travail d’annonce, j’étais tentée par un acharnement de la vérité : il faut du temps pour entendre, comprendre, saisir et s’affronter à l’inacceptable… » (un médecin, philosophe).
Dans la formation médicale, il n’y a pas d’accompagnement préparant à cette annonce : un médecin passionné de théâtre, a mis au point avec un acteur une formation pour sensibiliser les internes au langage non-verbal lors de l’annonce d’une maladie grave. Il est nécessaire de rééquilibrer la formation médicale avec un peu moins de technique et un peu plus de relationnel.
Accompagner, expliquer, être à l’écoute ; passer, pour former les futurs médecins, de la tête « bien pleine » à la tête « bien faite » : « la médecine de la personne ».
Il faut que je m’adapte à la nouvelle situation, cette capacité à trouver une autre norme qui sera différente de celle du retour à la norme organique. La maladie, c’est quand l’énergie ne circule plus. Guérir, c’est s’ouvrir à soi-même et aux autres : les « pourquoi » nous épuisent, les « comment » peuvent nous permettre d’avancer (un médecin devenu malade).
L’attention du soin
Le soin, c’est la relation. « C’est tout un travail d’équipe, du professeur aux agents de service hospitaliers, en passant par les soignants, le psychologue, l’assistante sociale. Partager nos fragilités en respectant la place de chacun» (une infirmière).
Est-ce que la relation s’apprend ? Oui, car il est nécessaire de faire preuve d’empathie en gardant la distance nécessaire, « en se situant à la juste place, dirait Marie-Hélène Boucand ». Faire preuve d’humilité quand on choisit le métier d’infirmière, car c’est entrer dans la relation de soin. Les échanges en équipe sont essentiels : dans le domaine de la compétence, mais aussi dans le compagnonnage.
L’acte de soigner se situe dans « l’intention » : technicité et humanité peuvent cohabiter.
La place de la famille est essentielle autour du patient : elle a un rôle majeur d’accompagnement. Il y a un travail d’ajustement à mettre en place entre les soignants et les proches.
L’essentiel est parfois réduit au strict minimum de la présence à l’autre dans la relation, dans le silence. Rencontre, présence, être là, chacun à sa place.
L’annonce faite à Marie (Marie-Hélène Boucand)
« Seigneur, voilà que comme un chiffonnier, Vous allez ramassant des déchets, des immondices, Qu’en voulez vous faire Seigneur ?
Le Royaume des Cieux ! »
(Marie Noël).
D’une mort annoncée au choix de la vie : « J’ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis donc la vie ! » (Deutéronome, 30,19)
En écoutant les mots « la miséricorde de Dieu », j’ai entendu : « la misère est corps de Dieu » !
« Nous sommes terrassés, mais non pas anéantis… » (St Paul 2Corinthiens, 4,7) « Quand je suis faible, c’est alors que je suis fort ! » (2Corinthiens, 12,10)
Les amis sont là, même éloignés : « On tient pour toi le quart (dans la prière) ! ».
Geste de me parfumer pour transformer l’innommable en communion avec Dieu…Tenir debout (les deux bouts ?) : à la fois consentir à la réalité et travailler l’Espérance !
L’angoisse de la mort m’a saisie. J’ai alors entendu la parole de l’Ange adressée à Marie lors de l’Annonciation, comme m’étant adressée personnellement « L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son Ombre… » : Certitude que Dieu sera là au moment de ma mort ! Jésus a connu cette angoisse à Gethsémani.
Ce qui est important, c’est la largeur de la vie (l’amour et l’humanité) et non sa longueur !
Dans l’épreuve, la traverser, tenir, espérer, nous ne sommes pas seuls !
Chacune de nos vies a une dimension sacrée : la vie est belle malgré tout !
Propos recueillis par Chantal Vinson
(Merci, Marie-Hélène pour votre témoignage bouleversant, lors de l’université d’été des Amis de La Vie de Sète, développé dans votre livre : « Le corps mal-entendu, Un médecin, atteint d’une maladie rare, témoigne ».)