En cet deuxième après-midi à l’université d’été, Laurette Launay a fait découvrir l’ikebana, un art ancestral japonais, à une dizaine de participantes.
En entrant dans la salle, une multitude de fragrances et de couleurs éveille les sens. Laurette Launay accueille chaleureusement ses élèves d’un jour et les invite à prendre place auprès des fleurs. Contrairement à l’art floral occidental qui repose sur l’abondance et la profusion, l’ikebana privilégie les compositions sobres et épurées. « Un petit papillon doit pouvoir passer entre les feuilles. » Le ton est donné et le cours commence. Laurette, très enthousiaste, explique la philosophie de cet art, entre harmonie et équilibre : « il s’agit de faire vivre les fleurs ».
Le shin, la branche la plus haute, représente le ciel et fait face au soë, autre ramure qui renvoie à l’homme. Au centre, l’hikaë, la plus belle fleur, symbolise la terre et se reflète sur l’eau, «un élément de la nature, essentiel à la composition », rappelle l’animatrice.
Les participantes se lancent et, dans une valse spontanée, s’emparent des fleurs et des rameaux. Le shin (la branche la plus haute) et le soë (une ramure) doivent provenir du même arbre et s’accorder avec l’hikaë (trois fleurs identiques). Elisabeth, très concentrée, jette son dévolu sur les branches de hêtre, dont elle aime la grâce, et sur le lisianthus blanc. D’autres participantes favorisent la couleur solaire des dahlias ou encore la douceur des hortensias.
Chaque branche est perçue comme une richesse
Laurette l’assure, « on exprime quelque chose de soi au moment où l’on fait le bouquet ». La singularité de chaque branche est perçue comme une richesse qu’il faut accorder en harmonie avec le reste de la composition. « Les gens tordus, au même titre que les branches, ont aussi leur place dans la société », estime Laurette, aussitôt approuvée par la petite assemblée.
Si le choix des plantes est libre, l’arrangement est très réglementé : longueur, angle et disposition des branches… Rien n’est laissé au hasard. Laurette, qui pratique l’ikebana depuis de nombreuses années, répète sans cesse qu’il faut élaguer et épurer la composition pour en apprécier la contemplation. Pour Madeleine Chabanolle, une participante, « c’est primordial de savoir élaguer, pour retrouver l’essentiel : le ciel, l’homme, et la nature ».
Les compositions achevées, les participantes, très fières de leurs oeuvres éphémères, échangent sur la sensation de sérénité qu’elles ont éprouvée à façonner la nature. « L’ikebana est une manière de donner quelque chose de soi, de participer à la Création », renchérit Laurette, et de rajouter dans un sourire « à notre petite échelle ».
Bouquets finis et visages réjouis, les participantes repartent toutes avec le sentiment d’être en phase avec le thème de l’université : « L’Art, création de soi, création du monde ».
Sarah Mesure