Professeure d’Ancien Testament et doyenne de la faculté de théologie et d’études religieuses de l’université catholique de Louvain, Bénédicte Lemmelijn est membre de la Commission biblique pontificale. Elle nous éclaire pour mieux comprendre le rôle de cette institution et les enjeux qui l’entourent.
par Soline Hariz
La Commission biblique pontificale (ou « PCB », « Pontificia Commissio Biblica » en latin) existe depuis plus d’un siècle et n’a cessé d’évoluer. Constituée en 1902 par le Pape Léon XIII, sa fonction est alors triple : promouvoir les études bibliques chez les catholiques, contester scientifiquement les opinions erronées sur les écritures saintes, éclairer les débats et les problèmes émergeant dans le domaine biblique. Au cours du XXe siècle, via plusieurs Lettres apostoliques (des lettres ouvertes du pape à destination d’un responsable de l’Église ou de fidèles), ses missions évoluent pour accompagner l’Église durant la crise moderniste (opposition entre deux visions de la foi, la tradition face à la modernité, au tournant du XXe siècle).
C’est en 1971 qu’apparaît la Commission biblique pontificale telle qu’elle existe aujourd’hui, avec une fonction supplémentaire : la délivrance de titres académiques en sciences bibliques. Le pape Paul VI établit des changements radicaux, notamment lorsque les cardinaux ont laissé place à des enseignants en sciences bibliques.
Comment s’organise la Commission ?
L’institution est composée d’une vingtaine de membres, originaires du monde entier, qui se réunissent chaque année après Pâques. Un nouveau thème est régulièrement défini par le pape, sur lequel la Commission produit un document qui sera ensuite présenté à l’Eglise mondiale et envoyé aux diocèses. Ce document se veut être une référence et constitue la position officielle du pape et, plus largement, de l’Église.
Sur quoi travaille la Commission ?
Pour le mandat en cours, le thème est celui du regard de la Bible sur la maladie et la souffrance. La réflexion théologique de la Commission s’appuie sur les figures bibliques et leurs récits, à l’aide des critiques et méthodes de recherche scientifiques produites sur ces textes sacrés. La rigueur scientifique des études est essentielle à la production de pensées éclairées. « Les documents, les textes, les opinions que nous réalisons en tant qu’humains ne constituent pas en eux-mêmes la vision de Dieu, souligne Bénédicte Lemmelijn, mais ils sont un essai de l’approcher le plus fidèlement possible ». Avant de préciser qu’il en est de même pour les dogmes, supposés être incontestables. Sans leur ôter leur caractère de révélations divines, « il ne faut pas oublier que les textes sacrés ont été écrits par des hommes. Ainsi, ils ne peuvent porter la vérité absolue. » Par l’éclairage de thèmes comme la maladie (mais aussi « Le peuple Juif et ses Saintes Écritures dans la Bible chrétienne » en 2001, ou « Qu’est-ce que l’homme ? Un itinéraire d’anthropologie biblique » en 2019), la Commission participe en un sens à lutter contre l’obscurantisme chrétien.
Quelle place pour les femmes ?
Membre de la PCB depuis 2021, Bénédicte Lemmelijn explique qu’elle est, pour le moment, chargée plus précisément de la réflexion sur la douleur liée à l’accouchement et à la stérilité. Alors que quatre femmes composent actuellement la commission, elle note qu’elle est la seule femme mère de famille. « Pour rapprocher l’Église des croyants, il faudrait davantage inclure les femmes laïques aux réflexions théologiques car elles portent un vécu et des opinions différentes des hommes du clergé. »
Un article de Soline Hariz