A Brive : le message de Jean-Robert Petit, glaciologue

“Il faudra du courage et de la solidarité” a prévenu Jean Robert Petit, glaciologue, le 21 septembre 2023, lors d’une conférence organisée par les Amis de La Vie à Brives, avec Olivier Nouaillas, journaliste, spécialiste de l’environnement.

Jean Robert PETIT glaciologue, Directeur de recherche émérite à l’Institut de Géophysique de l’Environnement Université Grenoble Alpes, annonce d’emblée que Brive évoque le courage et la solidarité. Le courage et la solidarité, il va en falloir !

L’étude des glaces nous a permis de remonter à 800 000 ans.

Historique des découvertes sur le climat :

-En 1824, Joseph FOURIER développe la théorie de l’effet de serre.

– En 1896, Svante ARRHENIUS affirme que les périodes glaciaires sont dues à une moindre teneur en CO2 atmosphérique.

– En 1941, Milankovitch montre qu’il y a une récurrence des périodes glaciaires.

– En 1957 commence l’histoire de la glaciologie avec Claude LORIUS, Louis Li GAUTRIE et Roland SCHLICH. L’Antarctique, 26 fois la France, continent voué à la recherche est l’objet d’un traité limitant l’action humaine (pêche, minerais, etc).

– En 1958, Charles KILLING établit la relation entre la mesure du CO2 et celle du réchauffement.

– Entre 1966 et 1968 commencent les premiers grands forages : l’extraction puis l’analyse des carottes de glace révèlent à travers leurs bulles d’air la température à un moment donné dans le temps, la nature des gaz et l’origine des micro poussières (par exemple de volcans).

– En 1980 mise au point du calcul de la concentration de CO2 dans la glace.

– En 1982 l’URSS et la France pour l’étude des carottes de glace à Vostok.

– En 1987 les résultats publiés dans NATURE mettent en évidence la relation entre climat et CO2 au cours des dernier s 150 000 ans.

– En 1990, Jean JOUZEL montre la sensibilité du climat global aux gaz à effet de serre.

– De 1989 à 1998 collaboration tripartite France-URSS-USA permettant de recueillir des données datant de 800 000 ans. On note déjà lors des années 1990 que les températures augmentent et le niveau marin aussi. La courbe climatique se calque sur celles des émissions de CO2 e de méthane.

Du Grenelle de l’environnement en 2007 à la COP 21 et aux Accords de Paris en 2015, le GIEC (créé en 1988) persiste à nous alerter sur l’urgence à inverser la courbe des températures qui mettent en péril le devenir de l’Homme sur la planète. Pour JR PETIT l’évolution du progrès a une incidence sur la température globale.

 Comment garder la mémoire de la Terre pour les générations futures ? Les scientifiques, au vu de la fonte des glaciers depuis 1970, recueillent et stockent des carottes glaciaires pour les chercheurs des générations futures.

Par ailleurs, la montée des eaux met en péril certaines populations insulaires ou proches des littoraux.

Si avec le ralentissement de l’activité et la baisse de CO2 induits par la pandémie on a pu penser que chacun allait prendre de bonnes résolutions et modifier son comportement, la reprise nous a prouvé le contraire…

Chaque année nous produisons près de 10 tonnes de CO2 par an et par habitant :

                                     2,8 t pour les transports

                                     2t pour l’alimentation

                                     2t pour l’habitat

                                     1,6 t pour la maison-loisirs…

Si l’on veut maintenir une Terre viable, il est impératif de réduire ces émissions à 2tonnes par an et par habitant. On peut souligner l’acte de résistance de l’Equateur qui a voté l’interdiction d’extraire le pétrole sur son territoire.

Aujourd’hui notre challenge est de devenir moins dépendants des énergies fossiles et de leurs lobbies.

 Olivier Nouaillas, ancien journaliste à La Vie, spécialiste de l’environnement souligne combien les signes d’alerte ont été nombreux : les conclusions des scientifiques et les 6 rapports du GIEC. Dont le dernier pose la question : comment préserver un avenir vivable ?

 C’est très difficile mais c’est encore possible. Ce qui est en jeu c’est l’habitabilité de la Terre. Il est urgent d’agir car

 – Le pic de la température doit être atteint au plus tard en 2025

– Les émissions de CO2 doivent être drastiquement réduites

– La neutralité carbone doit être atteinte en 2050

Les océans se sont considérablement réchauffés ! Il y a urgence à :

-RENONCER A UTILISER TOUTES LES ENERGIES FOSSILES

-DEVELOPPER LES ENERGIES RENOUVELABLES

-PROMOUVOIR UNE ENERGIE DECARBONEE

-METTRE LE CAP SUR LA SOBRIETE

L’été 2023 marque un basculement et même un « effondrement climatique » selon Antonio Gutterres, Secrétaire général de l’ONU.

En 2015 les petits états insulaires ont obtenu un consensus limitant la hausse à 1,5 °sans toutefois que des sanctions soient prévues en cas de non-respect.  Cependant, si la Chine et les Etats-Unis ne s’associent pas, la courbe ne sera pas inversée. Le défi auquel nous devons faire face a un lien très direct avec la géopolitique.

Il faut relancer le multilatéralisme onusien. Aujourd’hui les problèmes climatiques sont très liés aux accords politiques. On ne peut dissocier la justice climatique et la justice sociale. Les 10% des plus riches émettent 48% du CO2 mondial.

Tout se résume à trois verbes :

  • DIMINUER drastiquement les gaz à effet de serre
  • ACCELERER
  • S’ADAPTER

Le ministre de l’Environnement a récemment déclaré : « Nous devons nous attendre à +4 ° pour notre pays en 2100. »

Il faut être lucide et réaliste : la vitesse du changement climatique est supérieure à notre vitesse de transition.

Face à ce changement profond qui se dessine, Christian Glotte, chercheur, expérimente la mise en conditions extrêmes de personnes afin de tenter de s’adapter et d’éviter le pire.

Dominique BOURG, philosophe, affirme qu’il n’y aura pas de réussite sans resserrement des différences sociales.