Le 4 juillet à l’université d’été du magazine La Vie, Maylis Philip a présenté l’association inter-convictionnelle Coexister, au sein de laquelle elle est directrice de communication. Rencontre.
Quels sont les objectifs de l’association Coexister ?
C’est le mouvement des jeunes, qu’ils soient chrétiens, musulmans, juifs, athées, agnostiques… On agit en France, et maintenant un petit peu dans le reste de l’Europe, avec 40 groupes locaux, où on organise différents types d’actions. La principale est le dialogue : sous forme de conférences, d’échanges, de témoignages…
Un de nos travaux les plus importants est la déconstruction de préjugés. On intervient parfois en milieu scolaire ou dans certaines associations. On parle beaucoup de la laïcité, qui est souvent mal comprise, avec des confusions entre l’aspect juridique et politique. Par exemple, beaucoup pensent que la laïcité, c’est interdire les signes religieux dans l’espace public, ce qui n’est pas tout à fait vrai.
En revanche, on pense que parler, ce n’est pas suffisant : il faut faire des choses ensemble. Il y a des actions de solidarité – on est par exemple en partenariat avec le Don du Sang – pour montrer qu’on est capables de se mobiliser sur des valeurs communes de solidarité et d’entraide, et que c’est possible de le faire malgré des convictions différentes.
Des voyages à l’étranger sont organisés : on part au Liban cet été, pour vivre un temps long entre « coexistants » et découvrir d’autres cultures… Pour l’instant l’association agit surtout dans des grandes villes, mais dans les prochaines années, on aimerait se développer en ruralité.
Tu parles de déconstruire les préjugés. Comment vous-y prenez-vous ?
On organise des jeux qui dépendent de l’âge des personnes auprès desquelles on intervient, et qui permettent de faire ressortir les préjugés qu’ils peuvent avoir. On cherche ensuite à les faire réagir sur leurs propos, et on les accompagne dans la réflexion. Un préjugé a toujours une origine historique : on explique d’où il vient, puis on compare ce contexte à celui de notre époque, qui est totalement différent.
Dans une même pièce, ils sont plusieurs personnes de religions ou convictions différentes. Certains réalisent donc que, par exemple, l’image qu’ils ont des musulmans en général ne s’applique pas du tout à celui qui est présent à côté d’eux. Ça a plus d’impact lorsqu’ils comprennent par eux-mêmes, grâce à cette méthode ou à des témoignages d’expériences personnelles, que si on leur expliquait de manière théorique.
Peux-tu parler d’un voyage que tu as fait avec l’association ?
Je suis allée en Bosnie, pour former un groupe de jeunes qui allait faire le tour du monde. C’était la première fois que j’allais dans un pays qui avait vécu un génocide. Pour nous, jeunes Français, la guerre paraît très lointaine, alors que cette guerre civile en Bosnie est très proche de nous, autant d’un point de vue géographique que temporel (elle a eu lieu quand j’étais enfant). C’était donc très émouvant pour moi, qui suis très touchée par la question du génocide. On a rencontré des gens locaux, qui sont tous vraiment accueillants. Ce qui m’a le plus marquée, c’est que l’accès aux mosquées, aux synagogues, à n’importe quel lieu de culte, était totalement libre. C’est beaucoup plus compliqué en France. Là-bas, tout le monde pratiquait sa religion de manière ouverte.
Propos recueillis par Alice Pillet