Lors de sa conférence à l’université d’été, le musicologue Patrick Barbier a retracé l’histoire musicale de la ville à travers des lieux phares comme la cathédrale Saint-Pierre et le théâtre Graslin.
Patrick Barbier a résumé pas moins de six siècles d’héritage musical en deux heures. Ce lundi 11 juillet, l’enseignant en histoire de la musique baroque et romantique commence son récit en partant du Moyen Âge. Il évoque la psallette, une école de chant dirigée par l’Église et créée par l’évêque Henri le Barbu en 1413. À l’époque, c’est le principal mode d’éducation musicale de la jeunesse. Patrick Barbier le décrit comme un « travail fabuleux », d’autant plus qu’il était unique en son genre.
Mais la Révolution française bouleverse ce système et la psallette nantaise s’arrête en 1791. La musique qui était la mainmise de l’Église est alors enseignée dans les conservatoires laïcs, réservés aux adultes. Les enfants sont donc privés d’éducation musicale. Toutefois, la psallette est relancée dès la seconde moitié du 19ème. Elle devient mixte à cause du manque de candidats et existe encore aujourd’hui.
Le conférencier nous transporte ensuite vers « l’ endroit phare de toute vie culturelle et musicale nantaise : le théâtre Graslin ». Les spectateurs y restaient en général cinq heures pour voir de l’opéra, des comédies ou encore des ballets. Ce temps était leur seul moment de distraction.
Liszt, un “Dieu de la scène” altruiste
Ainsi, de nombreuses personnalités sont passées par Nantes et son théâtre Graslin. Le spécialiste cite Franz Liszt, pianiste virtuose et compositeur, venu à Nantes en 1845 pour trois concerts. Patrick Barbier en profite pour raconter une anecdote : « le piano orienté de profil vient de Franz Liszt, celui-ci voulait mettre en avant son profil avantageux ». « Ce Dieu de la scène », comme il le caractérise, était généreux. En effet, peu de personnalités s’arrêtaient dans des villes de province telles que Nantes.
De plus, celui-ci mettait à l’honneur les concerts caritatifs. Lors de sa venue, les Nantais lui demandent de faire un quatrième concert pour permettre de construire une crèche afin d’aider les femmes laborieuses. Liszt accepte et c’est une réussite. L’année suivante deux nouvelles crèches sont construites. Un autre nom est évoqué, celui d’Etienne Destranges, mécène érudit de musique, qui fit la promotion de Wagner. En 1891, la première nantaise de l’Opéra de Wagner est un succès.
« Il voulait que la musique classique rassemble autant de monde que pouvait rassembler un concert de rock. »
De nos jours, la région accueille de nombreux festivals. Patrick Barbier évoque les Rendez-vous de l’Erdre, festival de jazz au milieu des bateaux de plaisance de la rivière nantaise. Il présente aussi « la Folle journée » qui a lieu chaque hiver depuis 1995. L’universitaire mentionne René Martin, créateur et organisateur de cet évènement, dont il explique les intentions : « Il voulait que la musique classique rassemble autant de monde que pouvait rassembler un concert de rock. » Et le pari est réussi : chaque année le festival accueille des milliers de participants. Cette année avait lieu la 22ème Folle journée, toujours à la Cité des Congrès sur le thème de la nature. La conférence se termine par deux morceaux de musique de la dernière édition, de quoi finir en beauté ce voyage musical dans le temps.
Myriam Michalewicz