Quelques points essentiels pour comprendre cette invasion.
Invité le 7 juillet à l’université d’été des Amis de La Vie, Daniel Barbier a initié les lecteurs aux nanotechnologies. Ce professeur à l’Institut National des Sciences Appliquées (INSA) de Lyon, aussi chercheur à l’Institut des Nanotechnologies de Lyon (INL), explique à quel point elles sont présentes dans notre quotidien. Explications.
Il est difficile de s’y retrouver dans toutes les découvertes scientifiques et les termes techniques ! Elles sont “dangereuses”, “innovatrices”, ou “trop mystérieuses”. On entend toutes sortes de choses à propos des nanotechnologies mais qu’en sait-on vraiment ? Sont-elles des inventions futuresques ou au contraire ont-elles toujours existé autour de nous ?
Qu’est-ce que la nanotechnologie ? Dans la nature, il y a toutes les tailles d’objets ; des objets de l’ordre du mètre (êtres humains), du centimètre (insectes), micromètre (bactéries) et nanomètre (ADN). Un nanomètre est égal à un milliardième de partie de mètre. Prenons pour exemple un virus. Les virus font partie du « nano monde » car ils ont des dimensions de l’ordre du nanomètre, c’est-à- dire une taille comprise entre 0,1 et 100 nanomètres.
Les virus sont en moyenne mille fois plus petits que les bactéries. Les objets nanométriques sont donc extrêmement petits. Tellement petits que même les microscopes traditionnels (optiques) ne permettent pas de les observer. La nanotechnologie est en fait la conception d’objets à la taille nanométrique.
En réduisant la taille d’un objet en nanomètres, ses propriétés se modifient. Par exemple, quelques centimètres d’argent ne peuvent rien contre une blessure mais à sa taille nanométrique l’argent détient des propriétés antiseptiques ! On retrouve ces nanoparticules d’argent dans le domaine de la médecine, comme dans les pansements. Idem pour les cristaux. En réduisant leur taille on obtient des couleurs différentes quand on les éclaire. Ces études du « nano monde » sont ce que l’on appelle les nanosciences. Nous pouvons donc imaginer des infinités de nouvelles propriétés, plus extraordinaires et « futuresques » les unes que les autres. Elles n’attendent que d’être découvertes. Un véritable univers inexploré s’ouvre à la science.
Comment créer de telles technologies ? Avant, le microscope optique ne permettait pas d’observer des objets de taille nanométrique. C’est grâce aux avancées techniques que l’on a pu analyser des objets de plus en plus petits. Par exemple, l’apparition du microscope électrique a permis d’amener l’observation jusqu’au micromètre.C’est seulement avec l’invention en 1981 du microscope à « effet tunnel » que les chercheurs ont réellement commencé leurs recherches sur les nano objets.
Cet outil permet non seulement une observation atome par atome mais il est tellement puissant qu’il offre aussi la possibilité de déplacer les atomes d’une surface afin de créer des matières complètement nouvelles : des nanotubes de carbone, des fullerènes (voir la photo ci-dessous). Les nano objets sont donc crées soit par la réduction d’un objet déjà existant, comme l’argent, soit par la modification de structure d’une surface.
Où peut-on en trouver ? Aujourd’hui les nanotechnologies sont partout ! Dans les pansements, les filtres solaires, le béton, le les vêtements et même le ketchup ! Dans l’informatique on utilise essentiellement des nanopuces , rendant les objets plus performants et plus petits. Elles permettent aussi la création de nouvelles fonctions, comme le basculement des écrans de smartphones. En médecine les nano technologies commencent à voir le jour. Les nano capsules permettent un ciblage précis de la diffusion d’un médicament. Un problème subsiste : on ne sait pas encore où va la nanocapsule une fois le médicament diffusé.
Quels sont les risques et les restrictions ? Nous ne connaissons pas encore les effets exacts de cette science. La toxicité des nanoparticules sur l’Homme et son environnement inquiète. La communauté scientifique redoute un nouveau scandale à l’amiante. Pour l’éviter, certaines précautions ont été mises en place : les entreprises doivent se déclarer lorsqu’elles produisent plus de 100 grammes de nano matériaux. Mais ce ne sont pas encore des limitations concrètes, comme l’indique le dernier rapport écrit cette année par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES).
Comme Daniel Barbier l’a souligné : « La technologie va plus vite que la connaissance ». Combien de temps devrons-nous alors attendre avant de connaître la vérité sur les nanotechnologies ?
Margot Jamrozik