La théorie des intelligences multiples du psychologue américain Howard Gardner suggère qu’il existe huit formes d’intelligence distinctes chez l’Homme. Cette idée bouscule l’image d’une forme d’intelligence unique, standardisée, et mesurable. Spécialiste de l’apprentissage, Christian Philibert a animé un atelier sur le sujet à l’université d’été de La Vie auquel j’ai assisté. Je pense que l’école devrait s’inspirer de ces idées révolutionnaires.
Je connaissais déjà la théorie de Gardner mais c’est au cours de cet atelier que j’ai pris conscience de l’impact bénéfique du concept des intelligences multiples sur l’organisation de nos sociétés. Le psychologue américain affirme qu’il existe huit formes différentes d’intelligence. Les deux plus connues et valorisées aujourd’hui par le système scolaire français, que je qualifierais de cartésien, sont les intelligences linguistique et logico-mathématique.
Pour Christian Philibert, la première est définie par « la capacité à utiliser des mots et le langage sous différentes formes ». Les gens chez qui elle domine manifestent un goût et une aptitude prononcée pour la lecture et l’écriture. Tandis que la seconde est caractérisée par la capacité à manier les chiffres, conduire un raisonnement logique, résoudre des problèmes. Ce sont souvent des personnes qui se posent des questions sur le fonctionnement des choses et cherchent le pourquoi du comment. Les tests de QI mesurent presque exclusivement ces deux formes d’intelligence, 95 pour cent d’après le chercheur en neurosciences.
Les troisième et quatrième formes sont elles aussi travaillées et développées à l’école. Elles sont appelées respectivement interpersonnelle et intrapersonnelle. La première des deux se manifeste par la capacité à créer du lien avec les autres et à les comprendre. La deuxième se définit par une bonne connaissance de sa propre personne, ses atouts, ses faiblesses. Cette dernière se traduit par une indépendance d’esprit et une capacité d’introspection. Les personnes chez qui cette intelligence est prédominante sont souvent charismatiques et tirent les lecons de leurs experiences passées.
La cinquième forme d’intelligence, dite kinesthésique, s’exprime au travers de l’utilisation « fine et élaborée de son corps », nous renseigne Christian Philibert. Les artisans et les sportifs en ont souvent une très developpée. L’intelligence musicale est la sixième de cette liste. D’après l’ancien professeur Philibert, c’est la capacité à être sensible « aux sens, aux structures rythmiques, et aux mélodies ». Les artistes, les géographes et les chauffeurs de taxi ont les capacités de créer des images mentales et se représenter mentalement des idées. Ces dispositions définissent l’intelligence visuo-spatiale.
La huitième et dernière de cette liste est l’intelligence naturaliste. C’est l’aptitude à résoudre les problèmes dans l’environnement naturel, à reconnaître, à classifier, et à catégoriser la faune et la flore. Chez les Indiens d’Amazonie et les Aborigènes australiens cette intelligence prédomine.
Nous exprimons tous ces huit intelligences de manières différentes. Cela implique une immense diversité de profils. À mes yeux, la théorie de Garner révolutionne l’approche classique de l’éducation et détruit le modèle qui veut que l’élève s’adapte au système. Au contraire, il insiste sur l’importance d’adapter les outils pédagogiques à la personnalité de l’élève. Aujourd’hui, on qualifie les élèves non adaptés au système « d’échec scolaire ». Je leur donnerais plutôt le titre de « témoins des failles du système éducatif français ».
Il existe d’autres systèmes éducatifs faisant travailler à niveau égal les huit formes d’intelligence. Je pense aux systèmes éducatifs des pays scandinaves ou encore aux écoles Montessori en France. Maria Montessori était une enseignante dont la pédagogie mettait en œuvre les intelligences multiples grâce à différents ateliers gratifiants et non punitifs.
Et je suis bien placé pour en parler car j’ai passé tout mon primaire dans l’une de ces écoles. L’apprentissage repose sur la curiosité de l’enfant qui peut avancer en autonomie, et à son propre rythme. De par les petits effectifs, les institutrices s’adaptent aux besoins et aux difficultés de chaque élève, créant ainsi une relation de confiance avec l’enfant. Celui-ci peut alors exprimer pleinement ses capacités et sa personnalité. Le co-fondateur de Google, Larry Page, a par exemple été dans l’un de ces établissements. Il est l’un des symboles de la réussite de cette pédagogie.
On y apprend la tolérance de l’autre. Ce qui de nos jours manque cruellement dans nos écoles publiques, où l’on axe l’apprentissage du savoir, en ayant recours majoritairement aux intelligences linguistiques et logico-mathématiques.
Il est donc urgent de réformer un système éducatif sclérosé. Pour un mieux être des élèves, pour plus d’ouverture à la compréhension de l’autre. Ce afin de bâtir une société plus juste et égalitaire !
Théophile Martin
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