L’école du futur vue par Philibert et Toscani

TOS PHilÀ l’université d’été, nous avons rencontré un couple particulier réuni autour d’un même sujet : le rôle du cerveau et sa place dans l’éducation. Pascale Toscani a présenté la conférence du mardi 8 juillet « Les neurosciences : la bonne nouvelle de la plasticité cérébrale » et son mari Christian Philibert a pris en main l’atelier « Les intelligences multiples : un nouveau regard sur l’intelligence de chacun d’entre nous ». Entretien avec le couple sur le futur de l’enseignement.

Vous avez parlé d’une école du futur, comment fonctionnerait-elle ? Quelles méthodes utiliserait-on ?

 Pascale Toscani : On ne va pas parler de méthode. Les méthodes ça supposerait qu’il y ait une bonne et une mauvaise méthode. On va plutôt parler de regard différent, un regard plus scientifique car ce sont les apports des neurosciences qui nous permettent de comprendre le système cognitif. Avant on était dans des hypothèses théoriques, on n’avait aucune preuve. Avec l’IRM ça change les choses par rapport à ce que l’on peut proposer aux enfants.

 Christian Philibert : Ce n’est pas intéressant d’avoir une classe autobus, tous les uns derrière les autres. C’est plus intéressant s’ils sont entre eux et qu’ils se rendent compte de leurs fonctionnements différents. Il faudrait les mélanger le plus possible à l’intérieur du groupe afin qu’ils comprennent que toutes les intelligences se valent. Cet apprentissage entre eux est tout aussi important que celui de l’enseignant. C’est la co-construction du savoir.

 Pascale Toscani : Cet apprentissage est même plus important parce que les enfants comprennent des choses entre eux quelques fois beaucoup plus simplement qu’autrement. Le changement est d’arrêter d’enseigner en considérant que tous les enfants comprennent la même chose. C’est s’intéresser à chacun des enfants individuellement pour que l’enseignement corresponde à leur type de traitement cognitif.

 Christian Philibert : On pourrait parler d’organisation plutôt que de méthode : la façon dont on va répartir le temps, organiser les élèves, les faire travailler, la médiation entre le savoir et l’apprentissage. En fait, l’idée ce serait d’avoir un établissement où les élèves auraient plusieurs possibilités d’entrer dans le savoir.

 Ces compétences qualifieraient plus ou moins pour certains métiers. Par exemple, une intelligence plus rationnelle ou mathématique serait plus apte à faire ingénieur, non ?

Pascale Toscani: Justement c’est une erreur de penser que les intelligences multiples mènent à certains types de métiers. C’est trop tôt, cela les enferme, c’est comme leur dire «tu feras la section scientifique». Les intelligences multiples ne servent pas à orienter les élèves vers ce qu’ils vont faire en terme de métiers. Elles aident plutôt à leur indiquer ce qu’ils font mieux afin qu’ils puissent travailler sur ce qu’ils font moins bien. Leur profil est ensuite amené à évoluer dans les années à venir.

 Le système actuel, avec les notes, le stress, les évaluations, ne permet-il pas de motiver certains élèves ?

Pascale Toscani : Je ne suis pas sûre que les émotions négatives motivent. Il y a des élèves qui savent qu’ils doivent réussir et ils sont prêts à payer un prix dingue pour arriver à ce but. Par exemple, dans les classes prépas les élèves souffrent énormément mais ils acceptent cette situation. Les émotions négatives on sait que c’est néfaste. En revanche, les écoles sans note existent depuis longtemps, à Lyon par exemple. On constate une nette hausse dans les résultats.

Quand est-ce que nous pourrons avoir de telles écoles ? Est-ce vraiment un projet en cours ?

Pascale Toscani : Ce n’est pas juste une idée ! Un établissement ouvrira ses portes en 2016 !  Cela entamera un nouvel univers de recherche. On verra les résultats mais je pense que c’est un projet bien soutenu, on ne fait pas n’importe quoi.

Christian Philibert : Il y a plusieurs façons d’entrer dans cette école du 21eme siècle, il n’y aura sûrement pas une école type, genre Montessori, mais plusieurs autour d’un noyau central.

Propos recueillis par Margot Jamrozik

Pour aller plus loin, écoutez la conférence de Pascale Toscani en entier !