L’art contemporain, une expérience mystique

Dans le cadre de l’université d’été, les participants ont assisté à une conférence sur l’art contemporain. Ils ont pu découvrir que ce courant artistique est plein de spiritualité.

Un crucifix élaboré à partir de télévisions diffusant un match de foot. Jésus Christ en nouvelle égérie de Coca-Cola. Cela peut paraître étrange et provoquant, mais ceci à un sens. C’est ce qu’a prouvé Jérôme Cottin lors de sa conférence sur la spiritualité dans l’art contemporain. Jérôme Cottin est professeur de théologie pratique à la Faculté protestante de l’Université de Strasbourg. Il a pu travailler à de nombreuses reprises avec des artistes qui cherchaient à comprendre la valeur spirituelle de leurs créations. L’universitaire a nous démontré à quel point certains chefs-d’œuvre insolites sont en réalité pleins de mysticisme et de dévotion.

Un art insolite qui peut être dérangeant

L’art contemporain est souvent sujet à de nombreuses critiques, notamment lorsqu’il touche à la religion. Jerôme Cottin nous a donné l’exemple du « Sul concetto di volto nel figlio di Dio», pièce de théâtre de Romeo Castellucci qui a fait scandale dans plusieurs villes de France. Tout se passe entre un père sénile et incontinent, et un fils qui essaye de sauver son père de la déchéance. Pendant toute la pièce, est affiché le visage du Salvator Mundi de Messina. Il y avait là une image renversée de l’événement christique, jugée provocatrice.

@ Klaus Lefebvre
@ Klaus Lefebvre

Toutefois, pour Jerôme Cottin, le sens entier de la pièce a échappé au public, par inculture religieuse, par inculture artistique ou par des présupposés fondamentalistes sur ce que doit ou ne doit pas être un art qui investit les questions religieuses. Lorsque l’on questionne Castellucci à propos de ce visage il répond : « probablement il s’agit de Jésus, tout le monde peut le reconnaître, pour cette raison encore plus il s’agit de Jésus. ». En effet, une partie du tableau de Messina a été enlevée, comme pour semer le doute à propos de l’identité du personnage, afin que chacun puisse se positionner individuellement face à ce visage.

 

Pour Jerôme Cottin, l’artiste ne donne pas toujours ses clés car c’est au public de les trouver. Celui-ci doit faire un effort d’interprétation : peu importe si une œuvre choque, il faut se demander ce qu’a voulu faire l’artiste, ce qu’il a voulu dire, quel est son témoignage. L’art n’est pas au service d’une conviction religieuse elle est au service de ce qu’a voulu nous dire l’artiste d’après son expérience personnelle, c’est ensuite à nous de nous positionner.

La place pieuse, passionnée et moderne de l’art contemporain

L’art contemporain permet aux individus de s’interroger sur leur quête spirituelle et sur la société. Cela est visible dans l’œuvre présentée par Cottin : « This is my body », « This is my blood » de Alexander Kosolapov. Dans ses œuvres, l’artiste nous interpelle : nous vivons dans une société de consommation (représentée par les marques Coca Cola, ou McDonald) mais où est la communion ? Kosolapov offre une autre clé de lecture du monde et dénonce ainsi les signes commerciaux.

De même, l’artsite Orlan, spécialisée en body art, expose et a présenté au sein d’une abbaye “Unions mixtes, mariages libres et noces barbares”. Dans cette exposition, Orlan parvient à nous faire passer du présent au passé et unit ce qui s’oppose. De cette façon, l’artiste dépeint une société envahissante et le rêve d’une société utopique.  Elle créé, par exemple, un crucifix fait avec des téléviseurs diffusant un match de football. Une façon d’exposer sa pensée : elle considère que de nos jours les deux religions mondiales sont le christianisme et le football. Ceci étant causé en partie par la montée pressante des médias.

Enfin, le conférencier Jérôme Cottin a expliqué la place plus pieuse et passionnée de l’art contemporain à travers une œuvre de Valérie Colombel. Celle-ci a créé « Résurrection », une mosaïque contemporaine qui représente une silhouette androgyne qui est dans la même position que le christ crucifié s’élevant vers le ciel. Valérie Colombel est athée. Cependant, il semble que par son œuvre, elle est parvenue à la croix d’une manière inconsciente ce qui lui a permis de renaître. Il y a alors une résurrection de la spiritualité et une grande part des œuvres contemporaines sont renouvelées par cette dernière. Bien que déroutant, l’art contemporain réinvente le christianisme et celui-ci évoluera dans le futur comme il l’a fait dans le passé.

Candice Butin