Bernard Prieur, l’agriculture au prix juste

Bernard Prieur_resultatBernard Prieur a quitté Paris, il y a trente ans, pour monter une ferme dans les Pyrénées. Il est aujourd’hui à la tête d’une structure où les producteurs de sa vallée décident des prix en accord avec les distributeurs. À l’université d’été, il a animé deux ateliers sur l’agriculture alternative. Portrait.


Il veut sauver les agriculteurs de sa région. Installé à Fréchendets, un village de 33 habitants, au coeur de la Vallée des Baronnies, dans les Hautes-Pyrénées, Bernard Prieur, 75 ans, est bien décidé à ne pas laisser mourir les fermes de sa campagne. « Pour moi, l’agriculture, c’est une cause nationale », sourit-il. « Et puis si je n’agis pas, qui va agir ? »

 

Dessinateur, chef de bureau d’études, agent technico-commercial… La carrière de Bernard Prieur est atypique. « J’ai travaillé 20 ans en région parisienne avant de quitter la capitale dans les années 70 pour m’installer dans une ferme et pratiquer une agriculture propre », explique-t-il à la petite vingtaine de personnes venues l’écouter, dans le cadre de la quatorzième université d’été des lecteurs de La Vie, à Agos-Vidalos, près de Lourdes.

 

« Pour ma première traite, je me suis pris un coup de sabot »

 

Les débuts à la ferme ne sont pas faciles. Bernard et son épouse, Martine, n’ont aucune connaissance. Lui a lu plusieurs ouvrages sur l’agriculture. Elle se lance dans une formation agricole par correspondance. « Un diplôme d’agriculteur par correspondance, c’est quand même drôle ! », souffle notre homme. Le couple retape une veille ferme. Très vite, ils achètent des brebis, des vaches et des agnelles. « Pour ma première traite, je me suis pris un coup de sabot. Il y a tout un tas de gestes que je ne connaissais pas. C’était un handicap. Mais c’était aussi un avantage. »

 

Aujourd’hui, Bernard Prieur est à la retraite. Maire de son village, il est aussi à la tête de l’association Paysans des Baronnies. Fondée il y a une douzaine d’années, elle rassemble des agriculteurs, des distributeurs et des consommateurs afin de promouvoir la production, la distribution et la consommation d’aliments de qualité. « On se regarde dans les yeux et on travaille, c’est une structure qui donne satisfaction à tout le monde », dit-il.

 

« Le paysan est un esclave du monde industriel »

 

Remonté contre la production industrielle, Bernard Prieur défend une agriculture alternative. « Aujourd’hui, le paysan ne peut plus fixer ses prix, il est un ouvrier, un serviteur, un esclave du monde industriel », avance-t-il, avec passion. Concrètement, les neuf producteurs membres de son association vendent plusieurs de leurs bêtes au directeur du supermarché du coin. « Les producteurs fixent les prix et le supermarché accepte de faire un peu moins de marge », détaille le retraité. L’an dernier, 70 000 € de viande ont été vendus.

 

Bernard Prieur fourmille d’idées et ne veut pas s’arrêter là. Dans les prochains mois, il aimerait commercialiser des plats préparés dans le supermarché partenaire. « Les gens n’ont plus envie de cuisiner, il faut s’adapter et leur proposer une solution de qualité », explique-t-il. Il veut aussi lancer une école de la consommation avec des formations très courtes pour les consommateurs. « Il faut rétablir la confiance ! »

 

Paul-Luc Monnier